Dans un monde où les ressources sont limitées, le progrès infini n’est qu’utopie. C’est pourquoi la société Trans Oceanic Wind Transport fondée par Guillaume Le Grand a vu le jour en 2009 : de Porto à Douarnenez ou de République Dominicaine aux Sables d’Olonne, de vieux gréements sont remis à flots pour transporter cacao, café, thé ou alcool sans autre propulsion que celle du vent. Issues de l’agriculture biologique ou du commerce équitable, les marchandises livrées s’inscrivent de leur production à leur acheminement dans une démarche de développement durable et de transition énergétique.

Enivré par le vent du large mais surtout par sa cargaison, le Lun II, un voilier norvégien de 25m, transportait en juin dernier 20 tonnes de vin bio de Porto à destination des étalages du magasin bio Biocoop, qu’il a atteint en 10 jours. C’est au contraire un long voyage transatlantique qui a été nécessaire pour ramener aux Sables d’Olonne le voilier Leenan Head, doté de panneaux solaires et chargé de 3 tonnes de cacao en provenance de République Dominicaine. Là encore, la Biocoop mais aussi le maître chocolatier Saveurs et Nature ont pu s’approvisionner durablement en produits bios. Les voiliers de TOWT ont ainsi déjà parcouru 48000 milles et livré 400 tonnes de produits qui s’alignent aujourd’hui dans les rayons des magasins sous le label « Transporté à la voile ».

Cependant la navigation à la voile reste pour l’Homme une leçon d’humilité : le marin se retrouve à la merci d’éléments naturels parfois trop calmes, parfois déchaînés. L’essentiel point noir réside donc dans la durée du voyage, largement soumise aux aléas de la météo. Si ce temps supplémentaire ne constitue pas un problème majeur pour le transport du vin, du cacao ou du café, il pourrait le devenir si TOWT décidait de transporter des produits frais. Le surcoût n’est quant à lui pas excessif : il faut compter une augmentation de 10 à 20 centimes pour chaque bouteille de vin venue à la voile de Porto.

Les voiliers de TOWT sont aujourd’hui une goutte d’eau dans une mer d’énergies fossiles et de systèmes polluants, mais ce n’est qu’un début. En effet, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie sponsorise le projet d’un cargo-voilier capable de transporter plusieurs centaines de tonnes de marchandises. Une belle risée dans les voiles du transport maritime écologique.

Solène Jahan